Open Access, Panorama, Copyfraud : République numérique, la loi se dessine

Open Access, Panorama, Copyfraud : République numérique, la loi se dessine

Nicolas Gary / actualitte.com

Avec 900 amendements présentés, le projet de loi d’Axelle Lemaire, République numérique, avait un agenda chargé. Le vote n’interviendra qu’à l’occasion de la prochaine lecture, ce 26 janvier, mais d’ores et déjà, plusieurs points sont entendus. Au menu, Liberté de panorama, Open Access et d’autres encore, dont les députés ont pu débattre ce 21 janvier. Bilan des amendements qui toucheront directement le secteur de l’édition et du livre.

Fuente original: Open Access, Panorama, Copyfraud : République numérique, la loi se dessine – Les univers du livre.

Sur la liberté de panorama, l’amendement était simple : « L’opinion publique est unanime : prendre des photos dans l’espace public devrait être une liberté pleine et entière », expliquait-il.

Liberté de panorama : un pays-sage

« On pourrait également évoquer le viaduc de Millau. Nous sommes nombreux à trouver absurde le fait de ne pas pouvoir être photographié devant cet ouvrage d’art et je trouve absolument ridicule qu’on doive encore avoir ce genre de débat aujourd’hui », précisait la députée Attard en séance. L’idée est désormais inscrite dans la loi, mais sans l’ampleur que souhaitaient lui donner certains. « La solution la plus simple serait la liberté de panorama pour tous. Généralement les artistes en cause, les architectes par exemple, ont d’autres sources de revenus, bien plus conséquents que ceux qu’ils pourraient tirer de ces reproductions photographiques », expliquait Lionel Tardy.

En fin de compte seules les reproductions opérées par des particuliers à des fins non lucratives seront concernées. Une montagne, une souris…

Le Libre accès entendu : on est super open

Pour ce qui touche à l’Open Access, très débattu dans le secteur de l’édition, où chacun s’accuse de vouloir enterrer la recherche, la secrétaire d’État au numérique, Axelle Lemaire a rappelé les positions : « Nous avons d’ailleurs opté pour une simple faculté, pour le chercheur auteur, de diffuser en open access, sans créer une obligation légale. » Patrick Bloche, intervenu, souligne que les éditeurs scientifiques ont été entendus dans ce projet, avec la mise en place d’un « plan d’accompagnement du Gouvernement pour les éditeurs scientifiques français ».

Ce dernier, présenté par la secrétaire d’État, « prendra pleinement en compte l’impact économique et financier de la réforme pour les éditeurs scientifiques français, sur la base d’une évaluation partagée ».

Les délais prévus, permettant aux chercheurs de mettre en libre accès leurs parutions, dans un délai de 6 mois pour les parutions de sciences dures (maths, physiques, etc.) et de 12 mois pour les sciences humaines et sociales. Une avancée dans la communication et l’accès aux documents scientifiques, d’autant plus qu’elle répond à des enjeux de diffusion : « Plus la durée d’embargo est longue, plus l’audience est faible », nous rappelait le cabinet d’Axelle Lemaire. Adopté, c’est parti.

Copyfraud : ça ne passera plus

L’apparition d’un amendement destiné à combattre le copyfraud a également fait sensation. « Cet amendement vise à permettre aux associations dont l’objet est de protéger la propriété intellectuelle, de défendre le domaine public ou de promouvoir la diffusion des savoirs d’agir en justice contre toute action de “copyfraud” et d’abus de propriété intellectuelle. »

« Il ne s’agit pas de léser qui que ce soit ; il s’agit seulement d’empêcher des voleurs d’accaparer des morceaux du domaine public. Chers collègues, la justice est un combat mené par nombre d’entre nous. En l’espèce, nous voulons empêcher que des escrocs accaparent ce qui appartient à tous en utilisant le copyfraud, c’est-à-dire en faisant payer des droits sur un bien qui ne leur appartient pas », insistera Isabelle Attard durant les discussions.

« Ces actions de copyfraud peuvent être le fait de particuliers ou d’institutions, par exemple des musées, interdire la libre réutilisation d’œuvres dont elles assurent la conservation. » Ce qui ne doit pas pour autant laisse de doute sur le devenir du Domaine commun informationnel…

ActuaLitté, CC BY SA 2.0

Ebooks en bib’ : PNB, l’unique référence

Notons enfin que la question du droit de prêt numérique en bibliothèque faisait partie des discussions. L’amendement 88, retiré en Commission, revenait à l’Assemblée : il proposait l’institution d’une loi encadrant le prêt d’ebooks en bibliothèques, plutôt que des solutions contractuelles, comme il en pousse aujourd’hui. « Pour permettre aux bibliothèques de continuer à jouer leur rôle, il importe d’étendre le mécanisme de licence légale prévu par la loi de 2003 », assurait Isabelle Attard.

Et elle fut totalement tâclée par Axelle Lemaire qui n’aura su mettre en avant que l’offre Prêt Numérique en Bibliothèque – alors même que d’autres existent, comme l’avait souligné Fleur Pellerin. PNB n’était pas « exclusif du développement d’autres formules », répondait Valois à l’Association des Bibliothécaires de France.

Abritée derrière les principes des douze recommandations pour une diffusion du livre numérique par les bibliothèques publiques, Axelle Lemaire écartera l’idée d’une obligation légale. Selon elle, PNB serait donc plus souple et adapté que la loi qui régit l’actuel modèle de prêt pour les livres imprimés. Hmmm… Pour certains, comme Cécile Deniard, vice-présidente du Conseil Permanent des Ecrivains, le modèle contractuel n’est pas nécessairement celui qui soit le plus favorable pour les auteurs – en regard de la loi de juin 2003, sur le droit de prêt.

Ultime précision, les 12 recommandations n’ont aucune valeur d’obligation, et fort logiquement, l’ABF avait critiqué la mise en place d’embargo sur certains titres par les éditeurs, contraire à la première recommandation. Dire alors que l’offre PNB se développe grâce aux 12 recommandations revient à démontrer que l’on ne les connaît pas. C’est pourtant ce qu’Axelle Lemaire affirmait :

Cette offre connaît actuellement une très forte croissance, grâce, notamment, à l’adoption d’un texte par l’ensemble des professionnels concernés : je veux parler des douze « recommandations pour une diffusion du livre numérique par les bibliothèques publiques », qui permettent la mise en place d’un cadre équilibré, propice au développement de ce type de livres.

On ne peut pas forcément gagner sur l’Open Access et accepter de légiférer sur le droit de prêt numérique.

Les communs ? C’est d’un banal négligeable

Quant au domaine public informationnel ? L’intervention – la charge farouche – de Fleur Pellerin, ministre de la Culture, contre l’idée d’un domaine public positivement défini, avait retenti dans l’Assemblée nationale. « Il s’agit d’empêcher qu’une œuvre soit attaquée par d’autres droits alors que, de fait, celle-ci est dans le domaine public », rappellera la députée du Calvados. Un projet ambitieux insistera Christian Paul, car « [l]e commun, ce n’est pas le gratuit ; c’est ce qui se situe entre l’État et le marché » et la proposition « ne met pas en cause le droit des auteurs ».

Et de poursuivre : « Il s’agit en revanche de protéger les biens communs informationnels contre les nombreuses appropriations possibles. »

Mais l’idée restera sur le plan philosophique, et les communs, pour passionnant qu’ils puissent être ne mériteront pas d’avoir leur texte. « L’expertise juridique n’est pas mûre », conclura Axelle Lemaire, avec cette ouverture : Manuel Valls a garanti qu’une mission sur le sujet serait confiée à deux conseillers d’État, qui travailleront de concert avec les parlementaires. Peut-être pour une prochaine loi, avec une meilleure rédaction ?

Il sera toujours possible de retrouver les échanges, réellement intéressants, à cette adresse.

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