Tools of Change Francfort 2012 : l'édition numérique en route vers le web sémantique et les APIs | SoBookOnline

Tools of Change Francfort 2012 : l’édition numérique en route vers le web sémantique et les APIs | SoBookOnline.

On attendra TOC New-York (12-14 février 2013) pour les gros changements dans l’édition numérique; TOC Francfort (9 octobre) permet de prendre le pouls en début d’année. La tendance, déjà observée l’année dernière, c’est celle du tout-données-tout-marketing et l’intérêt croissant porté aux APIs, c’est-à-dire à de nouveaux modèles économiques qui ne passent plus par la seule vente directe de livres. La pénétration de plus en plus forte d’acteurs traditionnellement étrangers au « monde du livre » produit aujourd’hui des effets que l’on constate aussi bien dans les discours, que dans l’économie et les interfaces graphiques. On vient ainsi expliquer aux éditeurs que leur « business » doit être « social », « participatif », que les « lecteurs » doivent rentrer en contact direct avec les « auteurs », que l’observation attentive des comportements de ces acteurs peut avoir des impacts significatifs sur la recommandation de livres et les ventes (les outils se multiplient donc qui permettent la traçabilité et l’analyse des échanges et productions textuelles). Bref, l’industrie éditoriale se décline sur le modèle du Web (dit) 2.0 et, surtout, elle est priée de le faire, et vite (c’était déjà l’injonction de TOC NY 2012).

La synthèse proposée ici (voir toutes les autres depuis 2 ans; ressemblent le plus souvent à des compilations de petits billets mais bon ;-) s’appuie principalement sur les tweets produits pendant l’événement (#tocffm). J’ai dû couper plusieurs fois ma connexion internet, comme je n’arrivais plus à gérer sereinement le flux. Toujours aussi difficile de procéder ainsi (quasi-philologie) sans outil pour découper-annoter une timeline, d’autant plus lorsque 4 conférences ont lieu en même temps : il s’agit d’identifier un tweet, son producteur, et de les suivre, alors que 30 autres viennent perturber leur lecture. Ensuite réaffecter chaque tweet à la conférence inhérente (à partir du programme) et tenter de construire un récit (avec « l’atmosphère » si possible) en rassemblant plusieurs tables rondes. Vérifier-densifier à partir d’autres articles, enfin, la cohérence du récit en traquant chaque allusion, biographie, outil cité, après avoir fait plusieurs allers-retours d’ajustements. J’ai parfois complété avec d’autres conférences de la foire de Francfort qui ont eu lieu après TOC.

 

Marché, marketing et business

 

> Chiffres et appareils

L’étude de Bowker sur le comportement des lecteurs

Jo Henry de Bowker ouvrait la première conférence avec une étude internationale sur les tendances des consommateurs de livres numériques (l’étude d’O’Reilly l’année dernière me semblait bien plus complète). On apprenait ainsi qu’aux USA, l’utilisation des tablettes est bien plus importante qu’au Canada/qu’en Angleterre (des liseuses majoritairement) et que le téléchargeur lambda était un homme urbain actif avec un haut niveau d’études (1/3; c’est 90 % en Inde). Les choses changent cependant et l’on voit par exemple les femmes commencer à prendre une place dans cette répartition, ainsi que les lecteurs en dehors des villes. Même constat par ailleurs qu’au Digital Book World 2010 : ceux qui achètent le plus de livres numériques sont ceux qui achètent également le plus de livres imprimés; d’autres sont amenés au livre grâce au numérique. Dans l’ensemble, cependant, les ventes d’imprimés baissent (10 % des acheteurs anglais de numérique arrêtent le livre papier).

Concernant le piratage (deux conférences ont été consacrées à cette question, que je ne développerai pas plus : trop entendu parlé, et toujours les mêmes remarques) : 69 % des sondés USA déclarent ne jamais télécharger illégalement. Lorsqu’ils le font, c’est parce qu’ils ne peuvent pas trouver de titres légalement. Conclusion, donc : éditeurs, développez votre offre légale, son manque de visibilité est la cause de vos malheurs.

Si les appareils de moins en moins en cher (TXT vient de lancer sa liseuse à 10 euros) envahissent le marché, les grandes compagnies (Apple, par exemple) ne le dominent pas toujours grâce à eux : le PC, contrairement à ce que l’on pourrait croire, est en effet toujours le dispositif de lecture le plus utilisé.

Enfin, rien de surprenant : les consommateurs s’attendent à ce que le prix d’un livre numérique soit moitié moins cher qu’un livre papier. Seuls les indiens sont contents de payer plus cher (+ 12-20 %) pour des raisons bien mystérieuses qui n’ont pas été développées. ;)

L’étude de MEF sur le mobile

Andrew Bed de MEF Mobile est venu présenter une étude menée auprès de 10 000 utilisateurs de téléphones dans 10 pays. Les livres ne représentent encore aujourd’hui que 17% de la consommation de biens sur mobile (contre 59 % de jeux, 49 % de social, 47 % de musique, 41 % de photo et 31 % de news) mais il faut continuer à s’y intéresser. Pourquoi ? C’est un objet intime (smartphones comme téléphones basiques, qui représentent encore 37 % des canaux de ventes de contenu), plus engageant pour un consommateur (75 % des utilisateurs du réseau de lecteurs Wattpad sont ainsi sur iOs selon Allan Lau); les étapes vers l’achat sont par ailleurs réduites.

Des difficultés cependant : chacun (distributeurs, concepteurs d’OS, éditeurs, etc.) tente de contrôler l’émission de la facture pour obtenir des informations sur leurs consommateurs, ce qui conduit à des stratégies parfois coûteuses pour l’utilisateur (sortir de l’application iOS pour acheter sur un site externe, entre autres). Enfin, fait étonnant (on est plutôt habitué à entendre parler d’iOS), ce sont les utilisateurs de Windows 8 Phone qui sont les plus susceptibles d’acheter.

Le « glocal »

Réunis après TOC, lors d’une table ronde annuelle (Global 50) organisée par Publishers Weekly et TheBookSeller, plusieurs grands acteurs du livre numérique ont débattu de son avenir. Comme souvent, les propos les plus intéressants (Google expliquant que les livres sont super importants pour eux; B&N se réjouissant pour le lecteur de tous ces changements, bon…) étaient le fait de Michael Serbinis de Kobo, venu expliquer sa stratégie (voir sa présentation). Elle est connue : elle est « glocale » (terme à la mode), c’est-à-dire que Kobo pense à son expansion mondiale en s’affiliant systématiquement à un acteur local, bien implanté dans un pays.

Chaque pays a en effet ses propres spécificités (Au Japon, par exemple, on aime lire des mangas/des romans légers, on lit très vite et on achète beaucoup) d’où la nécessité de s’associer à un acteur local capable de bien le comprendre. Kobo, quant à lui, fournit « l’écosystème » (applications, appareils, etc.) ajustable selon chaque situation. Elodie Perthuisot (de la Fnac) a insisté sur la nécessité de s’allier à un acteur mondial (Kobo), même dans le cas d’un marché national : à ce niveau, il n’existe en effet plus que des compétiteurs mondiaux (Amazon, Apple, Google).

 

> Le prix des livres (encore) en débat

 

Le prix des livres numériques a occupé les esprits de TOC Francfort (Inaglobal vient de faire un billet là-dessus). C’est une thématique récurrente : l’année dernière, un des conférenciers avait fait remarquer que les agents, plus que les éditeurs, étaient très conservateurs en la matière et qu’il ne suffisait pas de baisser les prix pour voir les ventes augmenter. Car c’est bien le juste prix qui est difficile à trouver (Joe Wikert va même jusqu’à proposer de payer plus cher les résumés bien construits des livres que les livres eux-mêmes, souvent résumables en 10 pages)

Mediabistro avait détaillé récemment une fourchette de prix à adopter selon les produits (de 0,99 à 14,99 dollars). Pour ma part, j’avais plutôt proposé de les adapter en fonction de la valeur perçue. La table ronde Pricing Digital Content: Publisher and Consumer Perspectives a bien illustré la nécessité de pratiquer une tarification dynamique et les changements de perception en cours. Selon Anna Bets (de Nielsen Book), les gens sont ainsi de plus en plus prêts à payer cher les livres numériques dans les marchés établis. La barre symbolique des 9,99 dollars n’est plus vraiment la norme (à part chez Amazon, qu’il est impossible de concurrencer) et le prix moyen d’un livre numérique tourne maintenant plutôt autour de 12,99 dollars.

Qu’est-ce qui a changé ? Toujours selon Anna Betts, les gens trouvent que les livres numériques sont sous-évalués. Le tout gratuit, par exemple, a tendance à donner une mauvaise image de marque. Donc nécessaire de faire payer, même un peu, parce qu’un livre acquis de cette façon a plus de chance d’être considéré. Mais sans doute les éditeurs prêchent-ils ici pour leur paroisse car d’autres modèles existent (premier livre d’une série gratuit et le reste payant comme chez NumerikLivres ou Walrus).

Il n’y aurait par ailleurs pas de grosse différence entre un livre à 0,99 et 2,99 euros en termes de stimulation des ventes. Kobo fait même l’inverse et expérimente les lancements à prix fort avec diminution plus tard (les lecteurs n’aimeraient cependant pas observer les baisses brutales et trop rapides de prix suite à leur achat). L’actualisation des prix de titres précédents, au moment où un auteur en sort un nouveau, a été jugée positive.

Encore que les choses changent dès lors que l’on parle de « livres-applications » (dont la mort a été annoncée par Evan Schittman lors de la Digital Conference de Londres en 2011). Difficile, en effet, de les comparer à autre chose qu’aux applications elles-mêmes : la tarification livresque change en conséquence (on sort du domaine strict du « livre ») et adopte plutôt celle des App’Store. Les ventes restent cependant bien confidentielles (5 % seulement des consommateurs achèteraient des livres applications et 13 % les téléchargeraient gratuitement), même dans le cas des applis gratuites avec achat intégré.

 

> Marketing

Ganxy et Zola : deux outils au service des auteurs et des éditeurs

Au cours de la table ronde Innovators Track: Innovative Business Models, Joshua Cohen et Joe Regal ont présenté deux outils destinés aux auteurs et aux éditeurs. Le premier (Ganxy) se présente comme le couteau suisse du marketing direct (Libboo était le dernier en date) : en 2-3 minutes, un auteur peut en effet construire un plan destiné à ses lecteurs qui lui assure à la fois une vitrine, un centre d’analyse (des statistiques sont proposées sur la provenance des acheteurs) et une présence sur un ensemble de canaux de distribution (Twitter, Facebook, Pinterest, etc.). Avec des commissions très alléchantes, puisqu’on se passe des intermédiaires : 90 % pour l’auteur, 10 % pour Ganxy. On joue ici, comme souvent, sur l’idéologie de la désintermédiation et la libération des auteurs d’un carcan orchestré.

ZolaBooks associe la vente de livres, la « curation » et la « lecture sociale » dans un seul et même site. Selon son concepteur (Joe Regal), personne n’a jusque-là réussi à donner aux lecteurs ce qu’ils chercheraient, à savoir : l’achat d’un produit culturel (les gros éditeurs anglo-saxons sont partenaires) dans un espace à la fois institutionnel, professionnel et amical (c’est la politique d’Entrée Livres depuis quelques mois cela dit). Les éditeurs, qui touchent 70 % de la vente (30 % pour ZolaBooks) sont en fait invités à créer leur propre vitrine et à l’animer en s’appuyant sur les outils fournis par le site; les utilisateurs, eux, peuvent suivre, comme sur Twitter, des comptes qu’ils apprécient (d’auteurs, de curateurs, d’éditeurs). Enfin, et peut-être surtout, l’application de lecture de ZolaBooks est en HTML5, ce qui veut dire qu’elle peut être utilisée sur les principaux appareils. L’idée générale n’est pas trop mal mais comme on l’a noté :

 Une technologie publicitaire : l’index

C’est le découpage du texte et les technologies qui permettent d’avoir accès à chaque unité textuelle qui ont constitué véritablement une « révolution » dans l’histoire du livre (bien plus que l’imprimerie, donc). Mais les historiens ont aussi montré l’intérêt de ces technologies de repérage en termes marketing (voir une bibliographie dans ce billet).

Pilar Wyman, lors de sa conférence Book as Discovery Tool: E-book Marketing and Monetization via Indexing, n’a rien dit d’autre. Selon elle en effet, les index (comme les tables des matières, par ailleurs) ont un potentiel de conviction. D’où la nécessité de les intégrer dans l’extrait gratuitement proposé. Les livres gagneraient également à laisser un index toujours activable, constamment disponible au lecteur pendant sa lecture. Autant de questions qui avaient été brillamment développées par Jan Wright lors de TOC NY 2012, précédé par les propositions stimulantes de Peter Mayers.

 

 > Algo, recommandation et communautés

 

La conférence Merchandising/Discovery: Online and Off regroupait plusieurs acteurs du livre, parmi lesquels Otis Chandel, fondateur de Goodreads, qui est actuellement le réseau de lecteurs le plus important sur le web. Otis venait en partie faire la promo de son nouvel outil de recommandation de livres, lancé l’année dernière (voir mon billet). Pour lui, les algorithmes sont des substituts pour ceux qui sont trop paresseux pour aller voir ce que lisent leurs amis. Paresseux, mais gros lecteurs : comme on l’apprenait en effet lors de TOC NY 2012, ce sont les plus importants à utiliser ce type d’outil. Les lecteurs occasionnels, à l’inverse, s’appuient bien sur les notifications de leurs amis. Toute la difficulté consiste donc à trouver l’équilibre entre ces deux types de lectorats. Le but est cependant toujours le même : capturer le lecteur, c’est-à-dire le retenir en lui mettant sous le nez un prochain livre à lire (dans une logique moins industrielle, Lee Harris d’Angry Robot a présenté son site, où les lecteurs peuvent s’abonner à une offre de lecture et produire des fanfictions).

Si les réseaux de lecteurs fournissent des données sur les comportements des lecteurs, on aurait cependant tort de négliger les bibliothèques, qui sont de formidables espaces d’observation des tendances. Ainsi, selon Heather McCormack (de 3M Cloud Library), être plus près des bibliothèques permet aux éditeurs d’être plus près de leurs informations.

Jason Illian, partisan de l’achat impulsif, a lui insisté sur la nécessité de passer rapidement de la recommandation à la caisse. D’où l’intérêt porté aux téléphones portables et aux applications, qui offrent un meilleur contrôle de l’expérience. C’est sans doute pourquoi Jason a développé BookShut (voir mon billet), une application « sociale » développée par Rethink Books (dont c’est la spécialité) qui permettra donc d’étudier plus précisément le comportement des lecteurs. Des lecteurs qui, par ailleurs, pourront désormais venir de tous les horizons, puisque BookShout permet d’importer des livres numériques acquis sur la boutique Kindle ou Nook et, par conséquent, de contourner leurs DRM : 

 

> Vu d’ailleurs : les Pays-Bas et la Turquie

 

Lors de la table ronde Innovation, Threat and Opportunity in Changing Business Models, Mathijs Suidman de Centraal Boekhuis a souligné le dynamisme du marché du livre numérique aux Pays-Bas (quoique moins important que celui de ses voisins européens). C’est une région pionnière qui a su très vite expérimenter le prêt de livre. Les librairies hollandaises ont ainsi ouvert un espace en ligne qui donne la possibilité à un consommateur d’acheter ou de louer un livre selon différentes périodes définies par les éditeurs (jusqu’à 9 périodes de location avec abonnement possible).

Emrah Ozpirincci (Oxford University Press) est  revenue de son côté sur le projet Fatith qui prévoyait de déverser sur la Turquie quelques millions de tablettes (voir mon billet), suite à un lobbying mené en 2011 par de très grosses compagnies (Apple, Microsoft, Intel). Ainsi, d’ici 4 ans, plus aucun livre imprimé ne devrait être disponible dans les écoles turques. Dans une première phase, suivie par les presses de Cambridge et Pearson, 12.800 tablettes seront testées, puis 16 millions suivront, alimentées par un contenu totalement gratuit pour les élèves. 2 obstacles à relever cependant : la formation des enseignants (les étudiants ont une longueur d’avance évidente et piratent les tablettes dont l’accès au web est limité) et un droit d’auteur numérique à créer.

 

> Le marché de l’éducation

 

Le domaine de l’éducation a par ailleurs été abordé lors de la table ronde Digital Textbooks, Online Learning and the Future of Educational Publishing. William Chesser a fait l’apologie de son entreprise (Vital Source, 13 ans d’existence), qui compte aujourd’hui 2,5 millions d’utilisateurs sur 6000 campus et distribue chaque année des millions de textes numériques. Selon lui, 82 % des étudiants veulent des livres sous cette forme tandis que 47% continuent à demander une complémentarité papier/numérique.

On l’oublie souvent, rappellerai-je, mais les institutions représentent une manne financière colossale pour les éditeurs scolaires et scientifiques (c’est encore 98 % des revenus de l’édition numérique). D’où les récentes batailles au Brésil où chacun tente de placer ses pions. Vital Source a très bien compris comment tirer parti du fonctionnement des collèges et des universités. Son business model est assez simple : sa rémunération est en partie assurée par les frais de scolarité des élèves. La société a également réglé le problème du piratage : si le contenu est acheté par l’établissement pour chaque élève, il n’y a en effet plus aucune tentation de télécharger illégalement.

 

(Méta)données, APIs et web sémantique

 

> (Méta)données et web sémantique

 

1/3 des éditeurs ne s’occupe encore aujourd’hui pas de la qualité de leurs métadonnées selon le directeur de Book Industry Study Group, Len Vlahos (cf. The Metadata Value Chain). Ce qui veut tout simplement dire que leur catalogue est difficilement lisible voire introuvable. En conséquence, les ventes chutent considérablement (jusqu’à 5 fois lorsque les métadonnées d’un livre sont incomplètes et sans couverture !). Une bonne métadonnée est une métadonnée qui contient les bonnes données sur un livre (titres, couverture, nom d’auteur, etc.) dans le bon format et au bon moment (Jonathan Nowell, président de Nielsen Book). Elles se transforment donc tout le temps selon la cible envisagée (5 % des éditeurs seulement et heureusement disent que leurs métadonnées ne changent jamais).

Le monde arabe (troisième marché mondial, après l’UE et les USA) en prend progressivement conscience, comme l’a souligné Emad el-Akehal (Elkotob.com). S’il n’existe pas encore de registre de base de données (voir mon billet), les éditeurs commencent cependant à produire leurs propres ISBN dans ces régions. L’identification, l’accessibilité et la promotion des standards internationaux comme Onyx ou PanThema – lancé lors de la Foire – font également leur chemin.

Ces données internationalement structurées devraient donc faciliter leur liaison. Pas seulement les données bibliographiques mais bien le contenu lui-même (voir Your Book as a Database et Small Demons). Encore que l’équivalence données liées = données ouvertes, si elle est parfaitement légitime, n’est pas appréciée de tout le monde. C’est pourtant un immense champ de connaissances et de manipulation du savoir qui s’ouvre avec, à la clé, des associations fructueuses. L’agrégation de plusieurs catalogues (BnF + Centre Pompidou) permettra par exemple de recenser-rassembler automatiquement, pour un auteur donné, toutes les représentations picturales de ce dernier à partir des métadonnées récurrentes qui auront permis de décrire à la fois le livre et le tableau (exemple basique; le raisonnement inférentiel du web sémantique autorise des associations et des résultats bien plus complexes). Ainsi, comme l’a bien montré George Lossius (Publishing Technology) le taux de référencement des pages des éditeurs qui respectent cette structure va s’améliorer, comme les moteurs de recherche sont sensibles aux liens internes et externes faits entre différents objets.

 

> Le monde merveilleux des APIs…

 

Fournir une API (APIs in Publishing: Sell Your Content, Engage Your Audience), résumait très bien Virginie Clayssen, c’est un peu comme si un éditeur donnait à des développeurs les mêmes briques de légos à partir desquels des formes très différentes vont être élaborées. Plus concrètement, cette politique se traduit par l’accès (relatif) à des données d’une entreprise qui autorise des acteurs extérieurs à faire de nouveaux produits. Ainsi, Pearson vient tout juste d’ouvrir le catalogue de ses grands classiques ou de ses recettes de cuisine (8 APIs sont aujourd’hui disponibles), afin que les développeurs les « remixent », les transforment, les reéditorialisent dans de nouvelles interfaces. Et, bien entendu, l’éditeur touche des royalties (fonctionnement bien expliqué par Hubert Guillaud). L’ouverture des données est donc un moyen de compenser les pertes relatives des ventes directes de livres en embauchant sans frais une armée de développeurs créatifs, chargés de révéler aux éditeurs la richesse parfois insoupçonnée de leurs propres fonds.

Plusieurs produits ont déjà été créés avec les APIs de Pearson. Un enfant de 7 ans a par exemple mis au point un dictionnaire en 8 heures (lors d’un concours). Une agence a quant à elle monté un guide-application sur Android en exploitant les données-itinéraires-lieux-restaurants fournis par Pearson (à partir de ces mêmes données, une start-up va lancer une application complètement différente sur iOS). Autre exemple : une application de cuisine qui vous propose des recettes à partir des ingrédients que vous avez dans votre frigidaire.

Dans l’idéal, on devrait même pouvoir fournir une application de lecture qui exploiterait le catalogue de Pearson. Sauf que l’API a des limites et qu’elle bloque une telle entreprise :

On l’aura donc bien compris : les APIs sont également des outils de pouvoir qui permettent de museler les acteurs trop ambitieux (Amazon a déjà fait des victimes). Aussi peut-il s’avérer périlleux de bâtir un modèle économique uniquement fondé sur l’exploitation d’APIs propriétaires qui, du jour au lendemain, peuvent modifier leur licence d’utilisation.

Pour aller plus loin :

    Avec ReadMill, les auteurs pourront répondre aux lecteurs dans les marges de leurs livres

    À la recherche de la lecture (a)sociale (V) : catégorisation et cartographie

    Tools of Change de Bologne : «Apple gère la recherche comme Google fait des tablettes…»

    Livre numérique, annotation et espace

    La leçon de Tools of Change 2012 : le monde de l’édition doit «avancer, changer…et vite !»

    Une plateforme participative de traduction littéraire

    Digital Book World 2012 : «les livres sont partout !»

    Annotations numériques : les conclusions des derniers travaux de standardisation

    Books in Browsers : annotations et lecture sociale

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